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Publié le 3 mai 2021

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Avec un des plus faibles taux de diplômés d’Europe dans les filières STEM (Science, Technology, Engineering, and Mathematics), la Wallonie souffre d’un véritable déficit pour des compétences pourtant totalement indispensables pour son redéploiement économique et son rôle dans la société numérique.

Un constat interpellant


Alors que d'après l'étude Be The Change d'Agoria, la part d'emplois qualifiés, voire hautement qualifiés, ne cesse d'augmenter en Wallonie comme dans le reste du monde, le taux de jeunes diplômés dans les filières scientifiques et techniques demeure un des plus faible d'Europe (14 diplômés âgés de 20 à 29 ans pour 1000 habitants en 2018 contre 19,6 pour la moyenne européenne - source Eurostat). D'après une étude de l'ARES, les filières STEM n’attirent que 15,6% des étudiants en FWB (chiffres 2017-2018), ce qui constitue un des plus faible taux d’Europe avec 23% en moyenne. Ce constat pourrait être un véritable frein pour le redéploiement économique de la Wallonie et sa prospérité future.

Alors que le taux d'emploi de la population wallonne des 20-64 ans continue de progresser (de 61,1% en 2000 à 64,6% en 2020), celui des NEET (Not in Education Employment or Training) poursuit son recul (de 22,7% en 2000 à 11,7% en 2020).

Si le niveau d'études de la population belge continue également à progresser (35,2% des 30-34 ans disposaient d'un diplôme de l'enseignement supérieur en 2000 pour 47,8% en 2020), celui de la population wallonne vient d'enregistrer un recul de 2% ces deux dernières années. Ainsi, 30,0% des 30-34 ans disposaient d'un diplôme de l'enseignement supérieur en 2000 pour 42,5% en 2018 mais 40,6% en 2020 (Source Statbel).

Donner le goût des STEM aux jeunes


A l'image du Printemps des sciences, bien ancré aujourd'hui dans le paysage, l'Union Wallonne des Entreprises a recensé plus de 200 initiatives de promotion des sciences et des technologies.

Cependant, le déficit perdure.

En effet, plutôt que de promouvoir les filières STEM, il serait important comme le proposent de plus en plus de partenaires (Hypothèse, Sparkoh!, Kaleïdi, ainsi que les Centres de compétences TIC, dont Technobel avec ses activités Lego...) de miser davantage sur les initiatives de formation afin de mieux "outiller" les enseignants pour en faire de meilleurs "passeurs". Les initiatives de promotion des STEM auprès des rhétoriciens arrivent souvent trop tard. Il faudrait toucher les jeunes plus tôt quand les choix d'option, voire de ré-orientation, sont encore possibles.

La logique du Tronc commun (8-14 ans) va dans ce sens !

Les sciences informatiques, éternel parent pauvre

Il est problématique que les sciences informatiques, qui font pourtant partie intégrante de la culture scientifique auquel devraient avoir accès tous les élèves durant leur parcours scolaires, soient la seule discipline scientifique à ne pas figurer au programme des cours en Communauté française de Belgique.

Certes, les compétences numériques sont intégrées dans les nouveaux référentiels de compétences qui devraient entrer en vigueur en 2022 dans le cadre du Tronc commun, mais :

  • il s'agit des compétences numériques pour tous, (celles des utilisateurs et non des développeurs d'outils numériques, telles que décrites dans le référentiel européen DigComp) et non des compétences informatiques nécessaires aux filières "métiers";
  • elles ne sont pas intégrées dans un cours dédié bien qu'elles soient de nature "transversale". La langue maternelle, compétence transversale par excellence, fait l'objet d'un cours dédié (et fondamental). Les compétences numériques ne seront correctement prises en charge que lorsqu'elles feront l'objet d'un cours dédié, avec sa propre didactique et ses enseignants spécialisés, ...

On observe cependant un léger frémissement, les inscriptions dans les filières informatiques de l'enseignement supérieur non universitaire ayant enregistrés une légère progression, puisque nous sommes passés de 1642 inscrits lors de la rentée 2014-2015 (soit 15,00% des inscrits en filières STEM), à 2021 en 2018-2019 pour 16,58% du total STEM (source ARES). Gageons que les partenaires WallCode y sont pour quelque chose.

Par ailleurs, les jeunes femmes sont sous-représentées dans les filières STEM avec 24,3% et cela chute à 8,5% pour les filières informatiques (chiffres 2017-2018 de l'ARES). Ainsi malgré un nette progression du nombre de jeunes filles qui se sont inscrites dans les les filières STEM pour atteindre le chiffre de 6.812 en 2017-2018, le ratio reste faible car en valeur absolue le nombre d’étudiants réalisant des études supérieures et le nombre de jeunes hommes s’inscrivant dans les filières informatiques sont également en augmentation.

Pas d'égalité homme-femme sans diversité

Une enquête menée en 2019 par l'AMIs (Polytech Mons Alumni) auprès des femmes ingénieures membres de la Fabi (Fédération Royale d'Associations Belges d'Ingénieurs Civils, d'Ingénieurs Agronomes et de Bioingénieurs) et des étudiantes ingénieurs révèle que les principaux facteurs de motivation pour s'inscrire dans cette filière viennent :

  1. des parents pour 88% des répondantes,
  2. des amis pour 60% des répondantes,
  3. des professeurs pour 56% des répondantes, d'où l'intérêt de "booster" le rôle de "passeurs" des enseignants doit devenir une priorité des politiques STEM.

Cette étude insiste sur l'importance de :

  • promouvoir la diversité au travail. En effet, les milieux professionnels les moins accueillants pour les femmes présentent souvent un déficit en matière de diversité, comme le martèlent de nombreuses études internationales.
  • mettre en avant des modèles inspirant auxquels les jeunes filles peuvent se référer, comme par exemple la campagne Wallonia Wonder Women.

À propos de l'auteur.

Pascal Balancier


Agence du Numérique