Le Baromètre 2021 de maturité numérique des citoyens wallons dresse un bilan détaillé des changements dans l’équipement des ménages, de l’évolution des usages et de la progression des compétences. Dans un tout nouveau volet il sonde aussi la perception du numérique par tout un chacun et la compare à des données analogues collectées en Flandre par le digimeter d’IMEC.
Équipements et connexions en hausse
Ce sont principalement les smartphones qui ont progressé, faisant passer le nombre de foyers qui en possèdent au moins un de 76% à 90%. Les ordinateurs portables ont aussi progressé de 74% à 78%, tandis que les ordinateurs fixes et les tablettes numériques restent stables à 55% et 42%. La moitié des ménages (49%) ont à présent à la fois smartphone, ordinateur et tablette, tandis que 34 autres pourcents ont au moins un smartphone et un ordinateur.
Il ne reste donc que 4% des ménages qui n’ont aucun terminal numérique. Il s’agit principalement de couples de personnes âgées et de personnes seules.
85% des citoyens disposent d’un smartphone personnel (+10) et les "wearables" sont également en progression, notamment :
- les montres connectées (13%, +5),
- les bracelets biométriques (10%, +3).
L'effet Covid
La Covid a contribué à renforcer l’équipement des ménages : 18% des ménages ont acquis des ordinateurs principalement, mais aussi des tablettes, des smartphones, voire des écrans ou webcams. Les raisons sont principalement les nécessités des études des enfants (57%) ou du télétravail (42%), mais parfois aussi pour garder le contact avec les proches (12%).
10% des ménages actifs avec enfant(s) signalent cependant que l’équipement disponible reste insuffisant pour les besoins du télétravail et des études de tous les membres du foyer.
Connexions à Internet
94% (+4) des domiciles sont à présent connectés à Internet. 57% des utilisateurs considèrent que cette connexion est stable et satisfaisante, mais 12% la jugent faible car ils sont victimes de coupures et de lenteurs régulières. En termes d’équipement et de connexion, la fracture numérique d’accès a donc sensiblement régressé.
Les accès publics à Internet ont par ailleurs été beaucoup moins utilisés cette année avec des taux d’usage chutant à la moitié, voire au tiers, des usages de 2019. Les espaces publics numériques (EPN) n’ont plus drainé que 3% de la population en 2020, alors qu’ils en avaient accueilli 7% en 2018.
Usages d’Internet eux aussi en progrès
La progression sur les usages totaux est principalement le fait des femmes qui ont progressé de 6 points, alors que l’évolution n’est que d’un point pour les hommes. Pour les usages quotidiens, les progressions sont réparties sur toutes les classes d’âge et sur les deux genres.
Le smartphone s'impose toujours plus
De nombreux usages particuliers ont progressé, parfois de façon spectaculaire :
- la visioconférence passe de 42% d’utilisateurs à 64%,
- le téléphone par Internet progresse de 51 à 66%.
Le smartphone s’impose comme le canal par défaut d’un nombre de plus en plus grand d’interactions numériques, notamment la commande en ligne (43%, +16) ou les virements bancaires (58%, +16).
La progression relative la plus importante revient à la transmission des données médicales via Internet qui a plus que doublé, passant de 8% à 20% dans un contexte sanitaire qui ne pouvait être que positif pour cet usage.
Les communications par mail et par messagerie instantanée restent les usages les plus courants et progressent aussi :
- 82% des Wallons (+4) pour le mail,
- 74% (+7) pour la messagerie.
Les réseaux sociaux restent une valeur sûre (72%, +4) :
- Facebook (65%), loin devant ...,
- Instagram (25%),
- Snapchat (17%),
- LinkedIn (9%),
- Twitter (7%).
De nombreux sites web administratifs ont aussi vu leurs visiteurs augmenter, dont principalement celui de la FWB (28%, +6), certainement fort sollicité pour les consignes relatives aux études et à la culture dans la crise sanitaire. 32% des Wallons (+3) ont rempli une déclaration administrative en ligne.
De la même manière, les applications bureautiques en ligne (34%, +8), ainsi que le suivi de cours à distance (28%, +6) ont également profité de la situation très particulière de l’année 2020.
D’autres applications ont cependant été sévèrement pénalisées par la crise sanitaire :
- les réservations en ligne de voyages et restaurants, de 46 à 33%,
- la recherche d’emploi et le dépôt de CV, de 19 à 15%,
- la publication d’albums photos en ligne, de 24 à 16%.
Forte progression de l'e-Commerce
La crise Covid a également fortement influencé les types d’achats par Internet, induisant une progression nette pour :
- les vêtements, chaussures et articles de sport (71%, +8),
- l’alimentation et l’épicerie (29%, +10),
- les meubles et le mobilier de jardin (22%, +7).
À l’inverse, les voyages et réservations de vacances ont plongé (49%, -30), de même que les tickets de concerts et spectacles (9%, -27).
Ce sont surtout les acheteuses qui ont souvent préféré le terminal mobile pour l’achat en ligne.
5% des Wallons ont commandé en ligne pour la première fois à cause de la Covid-19 et 22% ont augmenté significativement leurs achats en ligne à cette occasion.
Un peu plus d’un acheteur sur trois préfère réaliser ses achats sur un site belge et il s’agit bien plus souvent d’acheteuses (41%) que d’acheteurs (33%) mais la majorité ne se préoccupe guère de cette localisation. C’est surtout la réputation du commerçant (51%) et les avis des consommateurs (41%) qui sont pris en compte dès lors que la sécurisation des paiements est garantie.
Lente progression des compétences et de la maturité numérique
Comme en 2019, tous les répondants ont été invités à déterminer leur niveau de compétences numériques en indiquant dans quelle mesure ils se sentaient à l’aise avec 15 tâches représentatives, dont 13 identiques à celles testées en 2019.
L’évolution est modeste, mais positive sur pratiquement toutes les tâches, hormis les deux nouvelles qui étaient effectivement plus difficiles, ce qui conduit à une progression globale du sentiment de compétence de 56 à 59. Cette évolution positive est nettement plus marquée chez les femmes (+4,7) que chez les hommes (+0,3).
Toutefois, ces compétences ne sont jugées suffisantes que par 76% de la population active et sont même considérées comme réellement insuffisantes par 20% (+2).
Ainsi, 35% de la population, soit 11 points de plus qu’en 2019, souhaitent bénéficier de formations pour améliorer leur maîtrise du numérique, dont 49% des étudiants, ainsi que 44% des employés et des chômeurs.
Combiné à un indicateur de maturité numérique qui, lui aussi, a positivement évolué de 46,9 à 50,8. La part des usagers les plus faibles s’est heureusement réduite de 20,6% à 17,9%, mais en même temps la part des citoyens ayant une maturité numérique élevée s’est aussi réduite de 16% à 10,7%, conduisant à un resserrement des niveaux moyens de maturité. Les maturités les plus faibles sont sans surprise surtout le fait des personnes de plus de 50 ans et surtout de plus de 75 ans. On y trouve aussi 20% de femmes et 15% d’hommes.
Mais une adoption réservée du numérique
Nouveauté de ce baromètre 2021, une batterie de questions évaluant les attitudes des citoyens vis-à-vis du numérique et qui permettent de comparer ces attitudes avec celles mesurées fin 2020 par IMEC en Flandre.
Cinq profils caractéristiques ont pu être tracés et montrent que :
- 9% des Wallons sont des "passionnés" des technologies digitales,
- 20% en sont des "compagnons" confiants, mais plus mesurés dans leur enthousiasme et plus sensibles aux contraintes.
- 29% sont des "ambivalents", avec une position qui reste positive, mais avec des doutes et des inquiétudes.
- 10% sont des "insoumis" qui ne négligent pas le numérique, mais en font un usage limité à l’essentiel en évitant de passer du temps sur les réseaux sociaux et sur leur smartphone.
- 32% sont des "éloignés" du numérique, ayant peu confiance et l’utilisant très peu, voire pas du tout.
La comparaison avec la Flandre montre un nombre nettement plus faible de passionnés et de compagnons qui ne sont que 29% ensemble, alors qu’ils sont 43% au nord du pays. À l’inverse, le nombre d’éloignés, 32% en Wallonie et 18% en Flandre, confirme une fracture numérique plus importante dans notre région.
L’enquête montre également que la sensibilisation aux impacts environnementaux du numérique reste largement à faire. Si plus de deux tiers des Wallons sont déjà informés de l’importance de prolonger la durée de vie des équipements, beaucoup moins sont conscients des consommations induites par le streaming et la haute résolution des images.
La fracture numérique glisse de l’accès aux usages
Selon le point de vue adopté, on constate que la fracture numérique d’accès ou fracture de 1er degré s’est bien réduite, puisque le taux de domiciles sans connexion Internet est passé de 10% en 2019 à 6% en 2021.
Toutefois, en considérant la fracture sur les usages, on observe que le groupe des Wallons avec une maturité faible ne s’est réduit que de 21% à 18% cette année. D'autre part, 32% des Wallons sont classés comme "éloignés" du numérique sur base de leurs attitudes vis-à-vis de ces technologies et peuvent raisonnablement être associées à une fracture de 3ème degré, à savoir la capacité à exploiter le numérique au profit de son propre développement.
Dans un contexte où le numérique est présent partout, il est donc difficile de considérer que la fracture numérique s’est réellement réduite, malgré des progressions intéressantes de nombreux indicateurs.
La fracture numérique change de nature en isolant potentiellement ceux qui ont des usages très restrictifs et qui ne se sentent pas à l’aise avec ces technologies et leurs implications sociétales.