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Publié le 19 janvier 2017

Le Smart Farming peut aider à optimiser la rentabilité des exploitations agricoles tout en réduisant la pénibilité de certaines activités et l’empreinte environnementale. La Wallonie en est à ses balbutiements. L’enjeu est de taille. Digital Wallonia lancera en 2017 un programme de sensibilisation pour développer son utilisation.

Des agribots, petits robots sans conducteur, arpentent des champs. Ils désherbent et épandent de l’engrais sur base d’informations précises sur les cultures collectées par des drones. Un peu plus loin, dans un pré, des vaches connectées sont équipées d’un détecteur de vêlage. Dans leur exploitation maraîchère, des agriculteurs identifient des mauvaises herbes à l’aide de leur smartphone et vérifient l’état de leur culture grâce à des lunettes connectées. Bienvenue dans la ferme de demain!

Un contexte (dé)favorable


Les défis du secteur de l’agriculture sont de taille. Le marché européen comporte déjà plus de 500 millions de consommateurs aux exigences toujours plus élevées en termes de produits fiables, sains et à des prix abordables. A cela viennent s’ajouter les nouvelles réglementations liées à la protection de l’environnement, ainsi que les difficultés économiques du secteur.

C’est dans ce contexte à la fois difficile et stimulant que se développe le Smart Farming, c’est-à-dire la mise à disposition d'outils numériques permettant de répondre aux enjeux du secteur, notamment de produire mieux avec moins.

Le Smart Farming


Le Smart Farming est la dissémination de technologies diversifiées combinée à une utilisation accrue d’informations collectées et traitées. Les agriculteurs y ont recours dans les activités de production et de distribution de produits agricoles, ainsi que dans la régulation des approvisionnements en intrants (eau, engrais, énergie, etc.).

Dans sa forme la plus aboutie, le Smart Farming représente un réseau de fermes connectées s'échangeant des informations leur permettant d'optimiser leurs pratiques agricoles.

Le Smart Farming se caractérise par l’utilisation de technologies autour de trois axes:

  • la collecte de données sur les exploitations agricoles;
  • la simplification du travail opérationnel des agriculteurs;
  • un réseau de fermes connectées: l’optimisation des activités et des interactions sur l’ensemble de la chaîne de valeur.

Le Smart Farming apporte des outils variés dont l'utilisation est à définir en fonction des spécificités des exploitations: la taille d'exploitation, le type de production et de culture, etc. Bien entendu, le recours au Smart Farming doit demeurer au service des agriculteurs.

Une aide pour les agriculteurs


Contrairement aux pratiques d’intensification ou de standardisation, le Smart Farming offre la possibilité de mettre en place une approche customisée pour chaque culture, plante et animal sans alourdir la charge de travail, tout en réduisant les intrants.

L’utilisation des technologies numériques dans le secteur de l’agriculture est un moyen pour:

  • produire plus avec moins d’intrants et moins d’efforts en liant les pratiques agricoles aux besoins personnalisés des cultures et du bétail;
  • développer des avantages économiques en stimulant la compétitivité grâce à des pratiques plus efficaces, mais aussi en créant de nouvelles opportunités commerciales grâce au temps libéré;
  • réduire les risques environnementaux et l’empreinte de l’agriculture en limitant, notamment, l'utilisation d'intrants.

Deux études indiquent des retombées positives


Nesta, organisme de recherche anglais, a démontré que l’intégration de technologies numériques pouvait augmenter, d’environ 18%, les revenus d’une ferme en activité mixte (culture de blé avec du bétail en pâturage) de taille moyenne en Angleterre (1) et minimiser les impacts environnementaux avec la rationalisation de l’utilisation d’intrants.

American Farm Bureau, organisme de recherche américain, a réalisé un sondage auprès d’un panel d’agriculteurs. Ceux-ci estiment que l’utilisation de nouvelles technologies réduit le coût des semences, des engrais et des pesticides d’environ 15% et augmente les rendements des cultures d’environ 13%.

Les technologies numériques


La transformation numérique du secteur agricole rassemble l'utilisation de plusieurs technologies qui s'articulent autour de trois axes précédemment cités.

Les satellites, les drones et l'Internet des Objets (IoT): la collecte de données

[caption id="attachment_189018" align="alignnone" width="800"] Technologies numériques pour collecter des données et aider les agriculteurs à prendre des décisions[/caption]

Les satellites et les drones sont utilisés pour collecter des données. Ils observent l'état des cultures afin de cartographier les variations en matière de, notamment, mauvaises herbes, rendements et état des sols.

Ces cartographies offrent des analyses précises et des prévisions permettant de mieux gérer les surfaces cultivées. Les bénéfices sont nombreux. Citons à titre d’exemples, l’optimisation de la planification des semis, l’identification des parties sèches des sols, le calcul des besoins en engrais ou en azote. En guidant la rationalisation des intrants et en limitant les maladies, l’usage de satellites et de drones à un impact positif sur le budget des agriculteurs et sur l’environnement.

Les satellites sont utilisés pour de grandes étendues. Par exemple, le programme européen de surveillance de la Terre, Copernicus, réalise une vue satellite de l'Europe tous les 5 jours avec une résolution de 10 mètres permettant ainsi d'observer l'évolution de grandes cultures et de repérer plus facilement des anomalies (exemple de visualisation réalisée par Quadratic).

L’utilisation de drones peut être complémentaire aux satellites. D’une part, leur résolution plus précise (centimétrique) se prête mieux à l’analyse de petites surfaces et, d’autre part, ils ne dépendent pas de l’ennuagement et peuvent être équipés d’appareils photos et de capteurs agricoles.

Quant aux objets connectés, ils peuvent être intégrés partout : sur les cultures, les animaux, les étables ou, encore, les tracteurs. Ils collectent des données et informent l'agriculteur en temps réel.

Les agribots, les tracteurs intelligents et l'Internet des Objets (IoT): la simplification des tâches

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Les technologies numériques simplifient et réduisent la pénibilité de certaines tâches agricoles[/caption]

Les tracteurs intelligents et les agribots allègent la charge de travail des agriculteurs sur des tâches opérationnelles et répétitives.

Les agribots sont des petits robots conçus pour accomplir certaines tâches dans le domaine de l’agriculture. Leurs utilisations sont nombreuses : injection d’engrais, arrosage des cultures, désherbage au laser, pulvérisation, traite des vaches, nettoyage d’une étable, récolte de légumes, etc.

Des tendances futuristes se profilent aussi avec l'utilisation des drones comme agribots. Ici, ils ne récupèrent plus des données, mais assistent les agriculteurs dans leurs activités quotidiennes.

Les tracteurs intelligents sont utilisés pour maximiser les rendements sur des tâches de grande échelle. Des tracteurs connectés peuvent, par exemple, intégrer directement des informations cartographiques pour un apport d’engrais sur mesure automatique. Leur équipement GPS permet d’optimiser les chemins au travers des cultures.

Si l’utilisation de robots entièrement autonomes dans des endroits non structurés, comme un champ, reste un grand défi technique, les équipements robotisés se répandent de plus en plus en milieu structuré, comme les étables.

En ce qui concerne l'Internet des objets, la pose de capteurs sur les animaux peut, par exemple, aider les agriculteurs à gérer efficacement leur troupeau à distance par l’envoi en temps réel d’informations comme leur localisation, leur santé ou encore un vêlage qui approche. Les capteurs peuvent aussi être utilisés sur les cultures ou embarqués sur des tracteurs pour mesurer des paramètres tels que la température, les minéraux, le taux d’humidité, etc. et adapter de manière automatique par exemple l'arrosage et l'épandage.

Le farming data: des fermes connectées et en réseau

[caption id="attachment_380687" align="alignnone" width="3000"] Dans son exploitation connectée, l'agriculteur prend des décisions en temps réel[/caption]

Les exploitations agricoles génèrent des données de toutes sortes. Le farming data vise à rassembler et stocker ces données dans un cloud, mais aussi à les croiser avec des informations extérieures (ex: prévisions météorologiques) et des données collectées sur d'autres exploitations.

L’objectif final est de transmettre l’information pertinente afin de prendre les décisions de gestion efficaces pour son exploitation en adoptant une approche spécifique par plante et par animal.

Dans cette optique du cloud, les fermes partagent leurs données facilement avec leurs partenaires (vétérinaires, fournisseurs d’intrants, etc.). Ces données constituent aussi une forme de preuve numérique pour répondre aux exigences de certaines réglementations et éviter le remplissage redondant de formulaires divers.

Si le secteur agricole en est encore à ses débuts en matière de stockage et de traitement de données, l'intégration des exploitations en réseau engendrera un potentiel de big data énorme.

Télécharger l’infographie complète Smart Farming Digital Wallonia.

Des fermes 2.0 en Wallonie ?


Selon l’observatoire CBC sur la transition numérique, l’utilisation d’internet touche à peine 21% des agriculteurs wallons sur le terrain, alors qu’ils sont 60% à l’utiliser pour leurs activités administratives.

En croisant les informations collectées par l'observatoire de la CBC et une étude française, il apparaît que la Wallonie est à la traîne par rapport à la France. En effet, 57% des agriculteurs français envisagent les technologies numériques comme un moyen d’accroître leur rentabilité contre 44% des agriculteurs wallons. Ils sont 30%, en Wallonie, à considérer que le numérique aura un impact environnemental positif contre 49% en France. Le recours aux drones existe depuis 3 ans en France, alors que la Wallonie n’en est qu’à ses débuts.

L’utilisation du numérique dans le secteur agricole wallon est encore faible. Un travail d’identification des moyens technologiques contribuant aux enjeux du secteur, ainsi que la planification d’actions de sensibilisation et d’accompagnement sont nécessaires pour ouvrir les perspectives prometteuses du smart farming.

Face à ce constat, Digital Wallonia se fixe comme objectif d’encadrer au mieux le secteur de l’agriculture dans cette transformation numérique par la réalisation des mesures de la Stratégie Numérique de la Wallonie.

Cartographie des fournisseurs wallons de produits et services de Smart Farming:

Cette cartographie est non exhaustive. N’hésitez pas à y contribuer en nous contactant.

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(1) Une exploitation de taille moyenne au Royaume-Uni compte 81 hectares contre 55 en Belgique

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