Dans le cadre du programme Industrie du Futur de Digital Wallonia, le parcours d'accompagnement des entreprises manufacturières, Made Different Digital Wallonia, distingue des Usines du Futur et des Ambassadeurs. Jumo Automation est l’un des lauréats Factory of the Future 2020.

Un état d’esprit : le "sur-mesure just in-time"


"Pour être meilleur, il faut être différent ", indique Bruno Radermacher. Pour faire partie des leaders, le Managing Director de JUMO prône deux incontournables : l’agilité et la digitalisation.

JUMO Automation est une filiale du groupe allemand Jumo, leader mondial dans le domaine des capteurs de température pairés (WMZ). Présent sur tous les marchés, il emploie aujourd’hui 2.500 personnes sur 14 sites de production.

Le groupe propose toute la chaine de la mesure du capteur à la solution d’automatisation pour des usages variés : température, pression, liquides, débit et humidité.

Fondée en 1971, Jumo Automation a su asseoir sa singularité. L’équipe d’Eupen, qui occupe 41 personnes, est spécialisée sur la production de pièces uniques en petites séries destinées à des environnements critiques, des "moutons à cinq pattes". L’entreprise joue le rôle de centre de compétences pour le groupe Jumo.

Pour se démarquer et rester compétitif au sein du groupe et auprès de ses clients, Jumo Automation a fait le choix stratégique de développer, entre autres, des sondes de température à haute valeur ajoutée destinées aux processus critiques tous secteurs confondus (cimenterie, verre, pharmaceutique, alimentation etc.).

"Il faut prouver en permanence ce dont nous sommes capables. Rien n’est jamais acquis" explique Bruno Radermacher. Et d’illustrer : "Nous avons, par exemple, créé des capteurs de mesure de température dans des fours allant jusqu’à 1.500 °C. Pour le secteur pharmaceutique, nous développons des capteurs de haute précision avec un temps de réponse rapide. Ces deux exemples démontrent bien la diversité des champs d’applications où nous sommes présents."

Se donner les moyens de l’excellence


"Notre maison mère nous avait donné un an pour y arriver. On l’a fait en six mois."

En 2017, l’entreprise peinait à respecter ses délais de livraison. "On arrivait à une taille critique. On gérait un tel niveau de commandes que les délais explosaient. On était passé de trois à six, voire huit semaines. C’était inacceptable", explique Bruno Radermacher.

Deux ans plus tard, les livraisons de Jumo Automation sont just-in-time."Aujourd’hui, notre production dure deux semaines, au lieu de huit. Notre planification est correcte. Nous avons retrouvé confiance en nous ainsi que celle de nos clients. Quand on dit ce sera livré le 30 juin, ce sera livré le 30 juin", se félicite le Managing Director.

L’usine a d’abord été agrandie et son workflow optimisé grâce à un premier investissement d’un million d’euros sur fonds propres (pour un chiffre d’affaires de 7,7 millions d’euros). Pour conserver la production en Belgique, un plan ambitieux a, ensuite, été présenté à la maison-mère.

Une fois approuvé, l’entreprise a mis son plan à exécution :

  • recrutement de personnel qualifié et formation en interne,
  • amélioration de l’équipement avec l’acquisition d’outils de production performants.

La priorité a été donnée à l’optimisation de la production avec des outils de production et de gestion connectés. Pour y parvenir, Jumo Automation a appliqué la stratégie de réduction des délais des processus "Quick Response Manufacturing" (QRM) particulièrement adaptée aux producteurs de petites séries en plusieurs variantes.

"Notre obsession : optimiser les processus. Nous n’avons pas l’obsession d’augmenter constamment la quantité de sondes produites, mais de satisfaire en premier lieu les exigences de nos clients. La qualité étant un pilier incontournable de nos valeurs", explique Bruno Radermacher.

Jumo a, par exemple, fait l’acquisition d’un poste à graver au laser directement lié à l’ERP. Cela permet de graver depuis presque tout type de fichier. La prise en main de cet outil étant assez facile pour les employés moins qualifiés, les spécialistes ont plus de temps à consacrer aux travaux à haute valeur ajoutée.

Et cette transformation est une réussite : "En 2003, on produisait 17.000 sondes par an. Aujourd’hui, on en fabrique 70.000 avec à peine deux fois plus de personnes. Et ce sont des sondes de plus en plus complexes. Faites le compte : on a pratiquement doublé la productivité par personne", se réjouit-il.

L’esprit Factory of The Future (FoF)


"Nous sommes fiers de notre évolution digitale. L’esprit FoF, c’est mille fois plus qu’un titre. Avec la digitalisation, on a déjà gagné. On a compris."

Et ce n’est pas fini : "la digitalisation va encore nous permettre d’augmenter la productivité de 20 à 30% dans les deux prochaines années. Rien qu’avec l’analyse des données." Il en est convaincu.

La digitalisation doit être un impératif pour tous les entrepreneurs : "Si vous ne vous occupez pas du 4.0, c’est le 4.0 qui s’occupera de vous. Cela va devenir un incontournable."

Cela ne signifie pas qu'il faut tout digitaliser. Une analyse approfondie s'impose avant toute transformation digitale. Ainsi, Jumo Automation ne possède pas de robot pour le travail à façon : "Il ne faut pas digitaliser là où il n’y a rien à digitaliser."

Par contre, le mariage raisonné de technologies de pointe et des compétences exceptionnelles du personnel peut faire des miracles.

"Durant la pandémie, Safran nous avait demandé de réaliser des micro-soudures sur le capteur de mesure de débit d'oxygène en sortie des appareils d'assistance respiratoire en service à l'hôpital Mont Légia à Liège. Nous avons relevé ce défi technologie avec passion grâce à la compétence exceptionnelle de notre chef de l'atelier mécanique et à l'usage d'un matériel de pointe."

La participation de Jumo Automation au consortium Biocloud 4.0 porté par le pôle Biowin en est un autre exemple.

Le secteur de la santé voit l’émergence de nouvelles générations de thérapies innovantes, parmi lesquelles des approches prometteuses liées aux thérapies génétiques et cellulaires. Cette évolution entraine le déploiement de processus centrés sur le patient, impliquant non seulement des modifications importantes des processus de bio-production mais aussi des augmentations significatives des coûts de traitement.

Pour répondre à ces défis, l’industrie de la biotechnologie aura besoin d’adopter et de déployer des principes de production au plus juste (lean) et le concept d’industrie 4.0. L’idée est de concevoir une solution intégrée complète (« de la salle blanche au patient ») associant de nouvelles générations de capteurs intelligents, une solution de radio-transmission radicalement innovante et des solutions logicielles centrées sur le patient.

Jumo Automation répond à ces nouveaux besoins en développant un nouveau système de mesures sans fil adapté aux besoins de l’industrie bio-technologique. Dans le projet Biocloud 4.0, elle est responsable du développement de ces nouveaux capteurs et de la technologie de transmission.

Poursuivre la digitalisation


Désormais, la production n’est plus une boîte noire. Un suivi précis est aujourd'hui effectué de l’entrée de la commande à l’envoi du produit. Les processus sont mieux tracés. Cette précision est indispensable pour une manufacture dont la production est faite en quantités limitées et variables.

Jumo Automation va poursuivre sa transformation en misant sur une plateforme de gestion plus performante.

Cela améliorera encore sa gestion, sa planification et le suivi de sa production pour plus de fiabilité et des délais de livraison encore plus courts. L’arrivée de ce nouvel ERP devrait permettre d’ici quelques mois d’implémenter également des tablettes industrielles pour mettre un maximum d'information à disposition des monteurs de production afin de les rendre encore plus compétents.

"Les compétences, cela ne se transplante pas ..." , explique Bruno Radermacher, " ... c’est la seule façon de conserver les outils et de maintenir l’emploi chez nous."

Encore faut-il pouvoir convaincre les collaborateurs de rester à Eupen. "On est à 20 kilomètres d’Aachen et à 60 kilomètres de Luxembourg. S’ils restent chez nous, c’est qu’ils se reconnaissent dans nos valeurs."

Ces valeurs avaient déjà convaincu Bruno Radermacher de rejoindre le groupe : "Je suis arrivé chez Jumo Automation parce que c’était l’opportunité de retrouver des valeurs auxquelles je crois. C’est une entreprise familiale avec les valeurs qui vont avec : respect, confiance, proximité avec le client et, in fine, la qualité.  Si le taux de rotation est relativement faible au sein du personnel, c’est que ces valeurs sont respectées de part et d’autre ."