Lors du sommet pour l’action sur l’IA à Paris, une coalition internationale a été lancée pour aligner l’intelligence artificielle avec les objectifs de durabilité environnementale. Portée par la France et le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), cette initiative ambitionne de réduire l’empreinte écologique de l’IA tout en exploitant son potentiel pour la transition écologique. Dans le cadre du programme Digital Wallonia 4.AI, l'Agence du Numérique participait à cet événement.

Le 11 février 2025, Paris a accueilli une avancée significative dans la gouvernance de l’intelligence artificielle (IA). À l’occasion du sommet pour l’action sur l’IA, la France, en partenariat avec le PNUE, a dévoilé la coalition pour une IA durable sur le plan écologique.

Réunissant gouvernements, entreprises, chercheurs et organisations internationales, cette coalition vise à développer une IA respectueuse des impératifs environnementaux tout en contribuant activement à la lutte contre les crises écologiques. Alors que l’IA connaît une expansion fulgurante, son impact énergétique et carbone devient un enjeu majeur. Cette initiative se veut une réponse concertée et ambitieuse.

Une coalition pour un développement responsable de l’IA


La coalition pour une IA durable, annoncée lors du sommet, incarne une ambition claire : faire de l’IA un outil au service de la durabilité environnementale. Elle s’inscrit dans une approche globale visant à harmoniser progrès technologique et respect des Objectifs de Développement Durable (ODD).

Les membres s’engagent à réduire l’empreinte écologique des systèmes d’IA tout en explorant leurs applications pour des défis comme le changement climatique ou la préservation de la biodiversité.

Le texte constitutif de la coalition est intégré à la déclaration sur une intelligence artificielle inclusive et durable pour les peuples et la planète, adoptée par 63 pays et blocs régionaux le 11 février 2025.

Ce document met en avant plusieurs engagements clés :

  • Rendre l’IA accessible à tous, notamment via des modèles ouverts, dans le respect des cadres réglementaires nationaux.
  • Garantir un développement et une utilisation durables de l’IA, sur les plans économique et environnemental.
  • Réduire l’impact écologique des technologies d’IA grâce à des solutions écoénergétiques.
  • Mobiliser l’IA pour répondre aux grands enjeux écologiques mondiaux.

Ces priorités traduisent une prise de conscience : sans encadrement, l’IA risque d’aggraver la crise environnementale. Mais bien utilisée, elle peut devenir un levier essentiel pour une économie décarbonée.

Un observatoire pour mesurer l’impact énergétique


Dans le cadre du sommet, un observatoire dédié à l’impact énergétique de l’IA a été créé en collaboration avec l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Sa mission : collecter et analyser des données sur la consommation énergétique et l’empreinte environnementale des technologies d’IA.

Cet outil vise à fournir des bases scientifiques robustes pour orienter les politiques publiques et sensibiliser les acteurs industriels à la nécessité d’une IA plus économe.

L’urgence est réelle. Avec la multiplication des datacenters et des modèles d’IA complexes, la consommation énergétique explose. Par exemple, l’entraînement d’un modèle de langage peut émettre autant de CO2 que plusieurs trajets transatlantiques. Cet observatoire jouera un rôle crucial dans la maîtrise de ces impacts croissants.

Le ministère de la Transition écologique en première ligne

Le ministère de la Transition écologique a été un moteur de cette initiative. Lors de la semaine de l’Action IA, il a organisé un événement dédié à l’impact environnemental de l’IA, réunissant experts, entreprises et décideurs. Ce rendez-vous a permis d’explorer les implications écologiques de l’IA et de proposer des solutions concrètes pour un usage plus durable.

Au sein du ministère, Ecolab, rattaché au Commissariat Général au Développement Durable (CGDD), s’est distingué par son expertise. Ce laboratoire d’innovation qui mobilise données et IA pour accélérer les transitions écologiques a pour mission :

  • La gestion des données et algorithmes pour le CGDD, afin de produire des bases de qualité,
  • L’animation de communautés d’acteurs publics et privés,
  • Le soutien à des projets d’IA frugale dans le cadre de France 2030.

Lors du sommet, Ecolab a enrichi les débats en partageant ses avancées sur l’utilisation responsable des technologies numériques.

Hackathon Frugal AI. Des solutions durables à l’honneur


Lors du forum for Sustainable AI, le hackathon Frugal AI a réuni des équipes issues du monde académique et de l’industrie. Co-organisé par Hugging Face, leader dans l’IA open-source, et Data for Good, cet événement a eu pour ambition de développer des modèles d’intelligence artificielle à la fois performants et écoénergétiques, en phase avec l’objectif du forum de promouvoir une IA durable.

Trois défis climatiques au cœur de la compétition

Le hackathon s’est articulé autour de trois tâches concrètes liées aux enjeux environnementaux :

  • Détection de la désinformation climatique (Quota Climat). Les participants ont conçu des modèles pour identifier les fausses informations sur le changement climatique, un défi crucial dans la lutte contre la manipulation environnementale.
  • Classification des régions à risque d’incendies (Pyronear). Les équipes ont travaillé sur des solutions pour prédire et classer les zones vulnérables aux feux de forêt, avec des applications directes en prévention des catastrophes.
  • Détection de la déforestation illégale (Rainforest Connection). À partir de données audio et visuelles, les modèles développés visaient à surveiller et repérer les activités de coupe illégale, contribuant ainsi à la protection des forêts.

Le Hackathon Frugal AI a mobilisé un éventail d’organismes allant des co-organisateurs (Hugging Face, Data for Good, ministère de la Transition écologique) à des partenaires stratégiques (PNUE, AIE, INRIA) et des contributeurs aux défis spécifiques (Quota Climat, Pyronear, Rainforest Connection). Ensemble, ces acteurs ont illustré l’importance d’une collaboration multi-sectorielle pour faire avancer une IA durable, capable de répondre aux enjeux environnementaux

Sasha Luccioni. Une voix pour la durabilité de l’IA

Le sommet a également mis en lumière les travaux de Sasha Luccioni, chercheuse en éthique et durabilité de l’IA chez Hugging Face. Lors de la conférence "IA, Science et Société", organisée en marge de l’événement, elle a présenté ses recherches sur l’empreinte carbone des modèles d’IA. Nommée parmi les 100 personnalités les plus influentes en IA par TIME Magazine en 2024, elle a marqué les esprits.

Sasha Luccioni a notamment détaillé l’impact du modèle BLOOM, dont l’entraînement a généré environ 50 tonnes de CO2, l’équivalent de l’empreinte annuelle de dix Américains. Elle a également évoqué CodeCarbon, un outil open-source qu’elle a co-créé pour mesurer les émissions liées aux calculs d’IA. Ses travaux, en résonance avec les objectifs de la coalition, soulignent l’importance de quantifier et réduire l’impact environnemental de l’IA.

Une étape clé pour l’avenir

Le sommet de Paris 2025 marque un tournant dans la gouvernance de l’IA, avec un focus inédit sur sa durabilité écologique. La coalition pour une IA durable, appuyée par l’observatoire de l’AIE, les efforts d’Ecolab et les recherches de Sasha Luccioni, incarne une volonté collective d’agir. Ces initiatives posent les bases d’une révolution technologique plus respectueuse de la planète.

Reste nénamoins à concrétiser ces engagements. Alors que l’IA redéfinit nos sociétés, son intégration dans une trajectoire écologique durable sera un défi décisif pour les années à venir. Paris a donné le ton ; la suite dépendra de l’action collective.

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À propos de l'auteur.

Pascal Poty


Agence du Numérique