Le secteur bois et ameublement en Wallonie est à l'aube d'une transformation majeure. Dans le cadre du programme Industrie du Futur, l'Agence du Numérique, Fedustria, Woodwize, Wood.be, la Filière bois Wallonie, Idelux et les entreprises Timbtrack, Mobitec, Gablok et InvestSud explorent comment le secteur wallon navigue dans cette (r)évolution. Ils abordent les défis et proposent des solutions innovantes pour un avenir plus résilient et respectueux de l'environnement.

Des spatules aux sommiers, des châssis aux ossatures bois, des planchers aux charpentes, le bois est partout ! En Belgique, des marques comme KewLox et Quickstep sont des références incontournables pour les candidats à la rénovation. Avec un chiffre d'affaires national annuel de 6,1 milliards d'euros (Fedustria, 2023), dont 65% destiné à l'exportation, ce secteur est un acteur majeur de l'économie.

Le bois est également un excellent observatoire des transitions durables et numériques. La circularité est au cœur des préoccupations de l'industrie, et le digital est un outil puissant pour optimiser ces processus. Le secteur bois et ameublement incarne parfaitement cette synergie entre durabilité et innovation technologique.

Un secteur diversifié et exportateur au défi de la transition digitale


Les entreprises wallonnes du secteur bois et ameublement offrent une gamme variée de services : ameublement, panneaux, construction, packaging, et bien plus encore, allant des aires de jeu aux pinceaux.

Un secteur majoritairement composé de PME

Représentées par Fedustria, qui regroupe 600 entreprises belges dans les filières textile, bois et ameublement, 90% de ces entreprises sont des PME locales à ancrage familial. Jean-François Pinget, conseiller aux affaires économiques chez Fedustria, souligne que "près de 90% de nos entreprises sont des PME et les chefs d’entreprise sont dans l’opérationnel, ils ont peu de temps à consacrer à des aspects plus stratégiques comme la numérisation des lignes de production". Beaucoup tiennent encore au travail manuel du bois, un savoir-faire précieux pour la fabrication de produits à haute valeur ajoutée."

La transition numérique en marche

La transition numérique est bien présente dans le secteur bois. Jeroen Doom, directeur de Woodwize, le centre de connaissances et de formations du secteur bois en Belgique, précise que "si on parle du BIM (Building Information Modeling) dans le secteur de la construction depuis quelques années, le dessin et la fabrication assistée par ordinateur (DAO-FAO) sont des réalités bien plus anciennes dans nos métiers."

La digitalisation transforme le secteur bois et ameublement à tous les niveaux. Elle touche l'administration et le marketing pour répondre aux besoins de l'industrie B2C, comme l'ameublement, avec des configurateurs, catalogues et ventes en ligne. Elle modernise les lignes de production avec des machines à commande numérique et la robotisation, améliore les études de stabilité et les contrôles qualité via des caméras intégrant l'IA, optimise la logistique et la gestion des flux, et intègre l'impression 3D dans l'ameublement ainsi que la réalité virtuelle pour la formation et la visualisation de chantiers en ossatures bois.

Défis et opportunités

Susanna Campogrande, experte innovation chez Wood.be, le centre technologique national de référence du bois et de l’ameublement, observe : "Il existe une vraie disparité dans l’adoption du numérique dans les entreprises." La taille de l’entreprise peut expliquer cette variation. Les compétences restent un enjeu crucial pour soutenir une industrie performante et résiliente.

Wood.be était un des partenaires du projet Dig'easy dans le cadre du programme Industrie du Futur. "L'une des activités appréciées par les entreprises participantes a été la contribution à un réseau d'apprentissage, basé sur des rencontres avec des experts, des visites inspirantes d'entreprises et le partage de bonnes pratiques ", se souvient Susanna Campogrande.

A l’image d’autres industries, la digitalisation du secteur accentue la pénurie de main d’oeuvre rencontrée par le secteur bois: "l’automatisation implique un besoin en main d’oeuvre qualifiée, et quand on choisit le métier de menuisier aujourd’hui, il faut savoir configurer une machine" poursuit Jeroen Doom (Woodwize).

Le défi est double: "Attirer les jeunes vers les formations menant aux métiers de la filière, et une fois formés, les maintenir dans le secteur car l’industrie de la construction est très agressive en raison de la pénurie" explique-t-il. Pour relever ce défi, Woodwize collabore avec l’enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles via des fiches-actions pour aider enseignants et étudiants à intégrer les nouveautés dans leurs cours et structurer la "twin transition" (durable et digitale) par la formation. Jeroen Doom voit un avenir prometteur pour le secteur : "Nous observons un intérêt croissant pour le bois, considéré comme une solution aux défis climatiques actuels."

"Certaines entreprises n'ont pas encore embrassé la transition numérique. Avec Wood.be et Woodwize, nous sommes prêts à les accompagner. Au-delà de la technologie, la formation des travailleurs et la recherche & développement sont cruciales. En travaillant ensemble, nous pouvons renforcer notre compétitivité ", affirme Jean-François Pinget.

Les entreprises Decospan et Van Hoecke ont montré l’exemple en obtenant cette année le label "Factory of the Future". En Wallonie, des candidats sont prêts à les rejoindre prochainement, grâce aux services offerts par le programme Industrie du Futur by Digital Wallonia.

Plus de cohésion pour plus de durabilité


La traçabilité du bois est une préoccupation majeure pour les entreprises, surtout avec les nouvelles régulations européennes. La norme EUDR (European Union Deforestation Regulation) vise à empêcher l'importation de produits liés à la déforestation dans l'UE. Dès 2026, les entreprises devront prouver que leurs produits ne contribuent pas à la déforestation. Les technologies jouent un rôle crucial pour les aider dans ce contexte. Le projet W.A.V.E. et l'entreprise Timbtrack en sont deux exemples.

Selon Susanna Campogrande, "la transition écologique nous pousse à considérer toute la chaîne de valeur du produit, y compris sa fin de vie, pour être le plus circulaire possible. Pour relever ce défi, une collaboration au sein du secteur est essentielle . Travailler en consortium dans le cadre du programme Industrie du Futur favorise la collaboration autour de défis communs, notamment la gestion de la fin de vie des produits et des déchets."

Exploiter les avantages du réseau, une possibilité rendue accessible à tous grâce à l'innovation digitale.

Les transitions durable et numérique se renforcent mutuellement. Les défis de la durabilité, malgré un ralentissement récent des politiques climatiques de l'UE selon certains observateurs, peuvent être relevés grâce aux avancées numériques.

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