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Publié le 15 novembre 2024

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L’International Computer and Information Literacy Study (ICILS) est une enquête internationale dont l'objectif est de répondre à cette question centrale : les systèmes éducatifs préparent-ils efficacement les jeunes à naviguer dans un monde numérique ? L'Agence du Numérique a analysé les résultats pour la Belgique.

L’International Computer and Information Literacy Study (ICILS) est une enquête internationale qui vise à évaluer les compétences des élèves en matière de littératie numérique et de pensée computationnelle.

Coordonnée par l’IEA (International Association for the Evaluation of Educational Achievement), cette étude s’adresse de manière très ciblée aux élèves de 8èmeᵉ année, soit l’équivalent de 2ème secondaire en Fédération Wallonie-Bruxelles. Cette cohorte est en effet stratégique pour l'évaluation des compétences, car les élèves approchent la fin de l'enseignement obligatoire de base et s'orientent progressivement vers des choix plus spécialisés dans leur parcours scolaire.

En analysant leur capacité à utiliser les technologies pour rechercher, créer, collaborer et résoudre des problèmes, l’ICILS répond à une question centrale : les systèmes éducatifs préparent-ils efficacement les jeunes à naviguer dans un monde numérique ?

Mesurer les compétences numériques : CIL et CT


L’enquête repose donc sur deux volets principaux :

  • la littératie numérique (CIL),
  • la pensée computationnelle (CT).

Littératie numérique

Ces tests permettent d’évaluer les compétences pratiques et conceptuelles des élèves dans des environnements numériques.

La partie de l’enquête concernant la littératie numérique mesure la capacité des élèves à collecter, évaluer et produire des informations numériques. Les épreuves s’étendent sur quatre niveaux, allant des tâches élémentaires, comme trouver une information simple en ligne, à une utilisation critique et autonome des technologies.

Les résultats montrent que 12% des élèves flamands n’atteignent pas le niveau 1, ce qui reste bien inférieur à la moyenne internationale de 24%. Toutefois, seuls 1% des élèves atteignent le niveau 4, ce qui indique un potentiel d’amélioration dans les compétences avancées.

Pensée computationnelle

La pensée computationnelle, introduite comme composante optionnelle de l’enquête, évalue la capacité à résoudre des problèmes logiques et algorithmiques, notamment via des boucles conditionnelles et des séquences de code. En Flandre, 7% des élèves n’atteignent pas le niveau de base, contre 10 % à l’échelle internationale. À l’inverse, 7% atteignent le niveau le plus élevé, une performance légèrement supérieure à la moyenne mondiale de 6%.

Résultats pour la Belgique (Flandre)


En littératie numérique, la Flandre se classe entre la 3ᵉ et la 13ᵉ place mondiale. En pensée computationnelle, elle se situe entre la 4ᵉ et la 9ᵉ place.

Ces performances témoignent d’un socle solide de compétences numériques. Cependant, des inégalités significatives persistent : les élèves issus de milieux socio-économiques moins favorisés peinent davantage à atteindre les niveaux les plus élevés, reflétant l’impact de la fracture numérique sur les apprentissages. Ces disparités mettent en évidence l’importance d’une politique éducative inclusive.

Et en Wallonie ?


La Fédération Wallonie-Bruxelles (FW-B), qui à l’enseignement dans ces compétences, n’a pas participé à l’édition 2023 de l’enquête ICILS, contrairement à la Flandre, qui y prenait part pour la première fois. Cette absence empêche de disposer de données spécifiques sur les compétences numériques des élèves francophones, rendant difficile une comparaison entre les communautés du pays ou avec les résultats internationaux.

Aurions-nous pu espérer des résultats similaires ou dans la moyenne ? Contrairement à la Flandre, où les compétences numériques sont intégrées de manière plus systématique via des finalités obligatoires et des cours dédiés, la Fédération Wallonie-Bruxelles est encore dans une phase de transition. Si le référentiel de 2020 (FMTTN) est un bon point de départ, son application varie selon les écoles et les enseignants, ce qui peut creuser des écarts dans les compétences acquises par les élèves.

La FW-B fait en effet face à plusieurs défis en matière de compétences numériques dans l’enseignement :

  • Tout d’abord, les inégalités numériques persistent, avec des écarts notables entre les écoles bien équipées et celles disposant de ressources limitées. Cette disparité entrave l’accès équitable aux outils technologiques et crée des différences significatives dans les opportunités d’apprentissage.
  • Par ailleurs, l’absence d’un cours spécifique et obligatoire consacré aux compétences numériques limite la systématisation de leur enseignement, entraînant une variation dans la maîtrise des compétences d’un établissement à l’autre.
  • Enfin, de nombreux enseignants se disent insuffisamment formés pour intégrer efficacement le numérique dans leurs pratiques pédagogiques, ce qui freine le potentiel des technologies en tant que leviers d’innovation éducative.

Enseignements et perspectives globales


L’étude souligne plusieurs enseignements clés :

  • D’une part, la formation des enseignants reste un défi. Bien que les TIC soient largement intégrées dans les écoles de certains pays, leur potentiel pédagogique est souvent sous-exploité, faute de formation adaptée.
  • D’autre part, il est crucial de dépasser l’enseignement technique des outils numériques pour développer une réflexion critique et éthique sur leur usage, notamment en matière de cybersécurité et de gestion de l’information.

L’intelligence artificielle, un enjeu clé


Le rapport s’intéresse enfin aux défis posés par l’intelligence artificielle (IA) dans le cadre scolaire. Des outils comme ChatGPT transforment les approches pédagogiques, offrant des opportunités inédites de personnalisation et d’automatisation des apprentissages.

Toutefois, l’IA soulève également des questions éthiques : comment garantir la fiabilité des contenus ? Comment protéger les données des élèves ? Comment éviter les biais algorithmiques ? Former les élèves à une utilisation responsable et éclairée des technologies est donc un impératif, tout comme garantir l’équité et la transparence dans leur déploiement.

Conclusion


L’ICILS 2023 dresse un portrait riche et nuancé des compétences numériques des élèves dans un monde en mutation.

La Flandre, bien que performante, doit encore relever des défis importants, notamment pour réduire les inégalités et approfondir les compétences avancées. L’éducation numérique, associée à une réflexion critique sur les nouvelles technologies, est plus que jamais essentielle pour préparer les jeunes générations à relever les défis d’un avenir numérique.

En Wallonie, bien que des efforts soient réalisés, la FW-B a encore du chemin à parcourir pour rattraper la systématisation observée en Flandre ou dans d'autres pays européens. Une meilleure harmonisation et des investissements ciblés seraient nécessaires pour garantir un accès équitable aux compétences numériques pour tous les élèves.

Pour en savoir plus

À propos de l'auteur.

Sébastien Reinders


Agence du Numérique